Aliens (suite)

Je me recroqueville sur moi-même, j’ai peur, je pleure, j’ai froid pourtant il fait au moins trente degrés. Je frissonne. Les larmes coulent sur mes joues rouges, je les laisse s’écraser par terre. Mon maquillage a dû couler, je ne ressemble à rien, et bien tant pis ! De toute façon personne ne me regarde, ne fait attention à moi ou quoi que ce soit. La seule chose que je reçois d’eux, ce sont leurs critiques et leurs insultes à longueur de journée. Je me relève, je regarde ma ville du haut de la colline, ma colline. J’essuie mes joues, et me recoiffe un peu. J’hésite un peu puis me téléporte, j’arrive dans ma chambre. Bizarre, je suis à peine arrivée que je ressens de la peur, de la gêne et du désir. Mon Dieu, qu’est-ce qu’il se passe encore dans cette maison ? Ça Provient de la chambre de Papa, encore plus étrange ! Je sors de ma chambre et ouvre la porte de celle de mon père ! Ô mon Dieu, il faut que j’arrête les blasphèmes ! Ce que je vois dépasse tout entendement. Vous voulez que je vous le dise, hein ? Et bien ma chère sœur s’est mise dans l’idée de coucher avec notre invité, elle ne changera jamais. Je tape du pied, elle arrête de l’embrasser et se retourne. Elle est en sous-vêtements, Beths aussi.

« Fous-lui la paix, il a la trouille ! Lui ai-je crié à la figure.

- Tu ne peux pas me laisser tranquille, c’est impossible !

- Je suis plus collante que la mort, il faut t’y faire, soeurette.

Elle prend ses vêtements, et s’en va, je l’ai vexé, c’est ce que je recherchais, j’ai réussi. Elle claque la porte et je l’entends descendre. C’est fini, Josh est très embarrassé, il remet son jean rapidement et enfile sa chemise. Puis il s’assoit sur le lit, il ne m’a pas regardé une seule fois depuis que je suis rentrée. Il baisse les yeux et joue avec ses doigts. Il m’en veux de l’avoir laissé ici.

- Qui te dis que j’avais peur ?

- Personne, mais je connais ma sœur, elle déteste les mecs qui ont peur d’elle. Comment ça s’est passé ?

- Je me changeais, elle a du me voir et puis après elle m’a sauté dessus, je n’ai pas eu le temps de comprendre ce qui m’arrivait.

- Elle te fichera la paix. Lui ai-je assuré.

- Tu m’avais dis que tu resterais avec moi, que tant que tu serais près de moi il ne m’arriverait rien. Mais c’est toi qui es partie !

- Excuse-moi mais je devais m’isoler quelques temps. Je n’aurai pas du te laisser, je sais, j’ai pris un risque. Il ne t’est rien arrivé, Dieu soit loué, je serai plus prudente.

- C’est bon, ne t’en veux pas pour si peu.

Je sens qu’il est sincère, ça me bouleverse, il a peur pour moi, il éprouve de la compassion. Jamais personne n’a fais preuve de gentillesse et de compassion envers moi. A part, Jack, mon prof de danse, enfin il était bien plus que ça, c’était mon seul ami. Ne pense pas à ça, Charlie ! En tout cas, Josh a le don de me surprendre mais ma confiance ne se gagne pas comme ça, au non ! Il va en baver le pauvre. Je souris. Je m’assois à côté de lui, il repense à cet incident dans ma chambre, de ce matin. Il se met à gargouiller, je ris. Il paraît ravi de m’avoir fait rire, n’importe quoi !

- Tu n’as pas encore mangé ?

- Non, ta sœur ne m’en a pas donné le temps.

- J’arrive.

Je me téléporte en bas, dans la cuisine. Je prends des pâtes et les fait cuire. C’est la seule chose que j’arrive à cuisiner correctement. Je ne vais pas me lancer dans un repas que je suis sûre de rater. Et puis j’ai dis à Clark que je revenais, sans nourriture ça ne servirait à rien ! Au bout d’une dizaine de minutes, elles sont cuites, je les mets dans deux assiettes et je remonte dans la chambre. Je retrouve Clark; il regarde des photos, une en particulier. Il y a une petite frimousse dessus, c’est la mienne, j’avais cinq ans, Maman me tenait contre elle, j’avais l’air heureuse. En tout cas plus qu’aujourd’hui. Il se retourne avec le cadre dans la main. Il s’assoit, je le rejoins. Je pose les deux assiettes sur le lit et le regarde. Il me tend le cadre. Je le prends, je passe mes doigts sur le visage de ma mère. Qu’est-ce qu’elle était belle !

- Vous vous ressemblez beaucoup. Dit-il.

- Plus que tu ne le penses.

- Elle est très belle, une femme magnifique. Me confie-t-il sincèrement.

Je remarque qu’il me fait un compliment en même temps, et qu’il utilise le présent, il ne veut pas me blesser. Je ferme les yeux un moment et inspire calmement. Je les ouvre. Il prend la photo de mes mains. Je lui tends une assiette, il s’en saisit et commence à manger, pour une fois mes pâtes ne sont pas collantes ni dures comme des os pour chiens. Heureusement sinon Josh aurait gargouillé encore longtemps ! Je mange aussi, c’est vrai que j’ai un petit creux mais j’avais d’autres choses à penser. J’entends Lucy dans sa chambre, sa présence me fait mal, je suis terrifiée et je ne sais même pas pourquoi. J’ai tellement besoin de parler mais personne ne m’a jamais écouté, alors je me suis renfermée sur moi-même, oubliant que j’avais le droit au bonheur, m’oubliant. J’ai réussi à tout contrôler, mon corps, mon cœur, mes mots, la seule chose c’est ma vie, elle m’échappe. Et je déteste ce sentiment, c’est comme vouloir emprisonner de l’air, on peut essayer autant de fois qu’on le souhaite, il s’envole. Clark m’observe depuis un moment, il est intrigué, ça fait plus d’un quart d’heure que je ne dis rien. Il s’inquiète.

- ça va, c’est comestible ?

- Oui, je trouve que tu es dure avec toi.

- Non je suis réaliste.

Il ne comprend pas mes réactions, tant qu’il ne connaîtra pas ma vie, et mon secret il ne le pourra pas. Mais je ne veux pas pour l’instant, c’est trop tôt, il n’est là que depuis deux jours, pourtant je me sens incroyablement bien avec lui. J’ai l’impression qu’on se connaît depuis des années et qu’il m’écouterait si je lui parlais. Je souris, je ne veux pas gâcher ce moment avec lui. Sa présence me réconforte, me rassure, elle meuble ce grand trou noir qu’est ma vie.

- Tu es fatiguée ?

- Non, il est quelle heure ?

- Vingt deux heures. Me dit-il.

- Je ne dormirais pas si je me couche tout de suite. Parle-moi plutôt de toi, comment c’était sur Terre ?

- C’était beau, des plaines, des rivières, des collines, un ciel sublime, des gens merveilleux. Mes parents étaient géniaux, des gens admirables, ils m’ont recueilli à l’âge de mes cinq ans, j’étais orphelin. Ils m’ont éduqué comme leur fils, m’apprenant les règles de la vie et le respect de tout être et toute chose. Mes amis étaient supers, mais il ne comprenait pas tout de moi, je n’arrivais pas réellement à me confier à eux, je me sentais étranger. Mais ça ne m’empêchait pas d’avoir des moments de joie.

- Et il n’y a pas une femme dans tout ça ?

- Oui, il y avait quelqu’un, elle s’appelait Heather, elle était très belle, gentille, intelligente, adorable, douce, un ange descendu sur Terre. Mais on n’était pas fait pour être ensemble. A chaque fois qu’on a essayé ça n’a pas marché. Mais je ne regrette rien.

- Excuse-moi.

- Ce n’est pas grave, on a tous une histoire. »

Je me lève, je pose ma main sur le bras de Clark et m’éclipse avec lui. Nous nous retrouvons sur ma terrasse. La nuit est tombée, mais il ne fait pas froid. Les étoiles sont merveilleuses, elles brillent de mille feux. Il règne un vent léger, il m’effleure puis continue sa route dans les arbres, au loin. Je le suis du regard, qu’est-ce que j’aimerai m’envoler avec lui, plus rien ne me retiendrait, j’irai où bon me semble sans que personne ne le sache. C’est beau la liberté mais quand elle est hors de portée, ça fait mal. Je m’approche des barrières, on entend le bruissement des feuilles, quelques lumières dans les maisons sont encore allumées. Je perçois des rires grâce à mon ouïe surdéveloppée, des rires d’enfants suivis de leurs parents, ils ont l’air heureux, heureux d’être ensemble, unis, de vivre. Est-ce qu’un jour je rirai ainsi ? Oh Charlie tu m’énerves! Arrête de broyer du noir ! Je dois vraiment aller consulter, je me parle à moi-même, enfin ce n’est pas nouveau. Il me rejoint, ça lui rappelle des choses, sa vie, un mot lui traverse l’esprit : forteresse de solitude, c’est l’endroit où il se recueillait, il observait le ciel, et très souvent Heather venait le voir. Un long silence s’installe mais ce n’est pas parce que nous n’avons pas de sujet de conversation ou de chose comme ça, nous apprécions ce moment à sa juste valeur, il faut respecter le silence. Je m’allonge par terre, il fait de même. Les étoiles m’hypnotisent, elles sont tellement belles, pures et généreuses.

- Comment c’est arrivé ? Je veux dire la mort de ta mère.

- Accident de voiture.

 

J’ai répondu ça sans intention, bien sûr ce n’est pas vraiment la réalité. Ça m’énerve de devoir lui mentir surtout que je sens que ça va me retomber dessus mais je ne peux pas lui dire, je n’arrête pas de me répéter ça, il faut que je me calme. J’imagine toujours le pire, il faut dire que ma vie ne m’a pas donné l’opportunité d’être optimiste. Mais j’ai appris à l’accepter, qu’est-ce que je peux faire d’autre ? Je me suis battue trop longtemps et maintenant je suis épuisée, j’ai perdu espoir, perdu la foi, j’ai perdu ma résistance. Une des pensées de Josh arrête ma réflexion, il se dit que je suis très mystérieuse, mais ça n’a pas l’air de lui déplaire. Il bâille, je souris. Nous nous relevons ensemble. Je le tiens par le bras et me téléporte dans sa chambre. Nous arrivons quelques secondes plus tard. Je le lâche, il me raccompagne à la porte. Je souris. Je vais exhiber ses pensées et ses sentiments dans notre conversation.

- Ne t’inquiètes pas pour demain, il ne t’arrivera rien. Dors c’est la chose la plus intelligente à faire.

- Alors montre-moi l’exemple, Miss Nelson. Je ne fermerai pas la porte tant que tu ne seras pas dans ta chambre.

- Tu connais mes capacités, je pourrai m’éclipser sans que tu l’entendes.

- Alors je vais peut-être devoir te surveiller jour et nuit.

- Rêve Beths !

- Toi aussi fais de beaux rêves, Charlie. »

Je lui donne un coup de poing dans le bras, en essayant de maîtriser ma force. Je me retourne et me rends dans ma chambre, contente de moi. Je ferme la porte, je le vois qui me regarde, je souris. Je me jette sur mon lit et m’enroule dans ma couverture. Je baise les volets par télékinésie puis éteins la lumière. Je ferme les yeux, cette journée n’a pas été aussi mauvaise que je l’aurai pensé. Josh réchauffe un peu ma vie, et ce n’est pas si mal parce que j’ai l’impression qu’elle est un iceberg. Chaque soir avant de m’endormir je fais le point sur la journée, ou ma vie parce que sinon je ne pourrai pas fermer l’œil de la nuit avec toutes les pensées que j’ai en tête. Je sens que je tombe dans les bras de Morphée…

Chambre de Charlie, 07h30.

Les premières lueurs du jour traversent mes volets et me réveillent. J’ouvre les yeux doucement, je ne veux pas me lever, je ne veux pas aller à l’université, je ne veux pas voir ces gens qui me regardent comme une bête curieuse, sans cœur. Ils me prennent pour une personne qui ne me ressemble pas, une personne qui est mon contraire. Je crois qu’ils ne survivraient pas une seule journée dans ma vie. Je voudrais bien les voir à ma place, ils ne supporteraient pas. Je m’extirpe de mes draps, je m’étire. J’ouvre mes volets et m’habille rapidement. Je descends les escaliers quatre à quatre et retrouve Clark dans la cuisine. Je m’assois et prend un café.

« Tu es bien matinal ! Ai-je fanfaronné.

- Je suis fils de scientifiques, mais ils tenaient une ferme aussi. On se lève tôt pour s’occuper des bêtes. C’est la routine.

- Tu ne me l’avais pas dis.

- Tu ne m’as presque rien dis sur ta vie.

- Il n’y a rien à dire…

- Je n’en suis pas aussi sûr. »

Une réponse à “Aliens (suite)”

  1. phantom dit :

    bonjour, houlà, va falloir que je m’attardes par ici, je sens l’odeur de l’encre encore fraiche! je reviendrais! a++++++

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